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Le bavardage, ça prend la tête et on n'a rien dit encore

  • Photo du rédacteur: François Muller
    François Muller
  • il y a 1 jour
  • 4 min de lecture
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 Jan Steen (Leyde, c.1625/1626-1679), Une salle de classe, c.1670 Huile sur toile, 81,7 x 108,6 cm, Edimbourg, National Galleries of Scotland  voir https://passee-des-arts.over-blog.com/article-l-ecole-de-l-ironie-une-salle-de-classe-par-jan-steen-110618614.html



Lors d'un trop récent conseil de classe de 5ème en collège, les enseignants ont été unanimes pour déplorer le "bavardage" généralisé pour ce groupe de 31 élèves dont les 3/4 sont en CHASE (section sportive); pourtant aux résultats scolaires bons ou très bons, mais au comportement erratique et perturbant; le quart restant est constitué d'élèves aux difficultés signalées et relevant de situations adaptées (PAI, PAP, et dys-); les mentions sur le bulletin sont nombreuses et signalées explicitement; Cela réglera donc le problème ?


Ce consensus sur le mot "bavard" s'attache pourtant plus au symptôme qu'aux causes; et peut faire écran sur les réponses plus adaptées à cette situation de crise, et vécue comme telle. Il s'agirait ici d'analyser ce bavardage généralisé et ici à un haut niveau de curseurs (voir infographie), comme le produit d'un éco-système où les acteurs sont impliqués à haut niveau, les élèves évidemment et leurs profs.


Une situation vécue difficile et une analyse plus complexe à partager

L'envahissement du cours par le bavardage (ou le bruit et l'indiscipline) au collège s'explique par une combinaison de facteurs liés à la dynamique de la classe, aux méthodes d'enseignement et aux conditions structurelles du système éducatif,.


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Facteurs liés au climat de classe et à l'environnement scolaire (le bruit et l'indiscipline)

Le bruit est la nuisance la plus reconnue et subie par les enseignants. Les élèves eux-mêmes signalent que le bruit les gêne considérablement dans leurs apprentissages.


  • Temps perdu à gérer la discipline Les enseignants consacrent en moyenne 17 % du temps de cours à gérer la discipline de la classe, un pourcentage supérieur à la moyenne de l'OCDE (13 %),. Cet écart représente environ trois jours de classe perdus par an, un chiffre qui augmente dans les collèges défavorisés.


  • Insécurité et climat scolaire L'indiscipline est liée à un climat scolaire moins favorable que la moyenne de l'OCDE,. Tant que les besoins fondamentaux des élèves, comme la sécurité (absence de harcèlement ou de conflit), ne sont pas satisfaits, ils ne peuvent pas consacrer leur attention à l'apprentissage. Une proportion importante d'élèves considère même comme possible une agression physique envers un professeur, ce qui témoigne d'un changement dans la perception de l'institution scolaire.


  • Indiscipline liée à l'hétérogénéité La France fait face à des problèmes de discipline plus importants en partie parce que les enseignants sont confrontés à des classes plus hétérogènes, notamment en termes de milieux sociaux défavorisés,.


Facteurs pédagogiques et engagement des élèves

Le bavardage peut être un symptôme du désengagement des élèves ou de méthodes d'enseignement qui ne favorisent pas leur participation active,.

  • Le modèle de transmission frontal Les enseignants qui rencontrent le plus de difficultés dans la gestion de classe sont ceux qui privilégient un enseignement frontal et magistral, où l'élève est majoritairement en posture d'écoute. Ce modèle est parfois une reproduction de la façon dont les enseignants ont eux-mêmes été formés.


  • Manque d'activité et d'intérêt Les élèves manifestent leur non-adhésion au projet scolaire par l'agitation. Les activités jugées intéressantes sont souvent celles qui touchent à leurs préoccupations personnelles ou à des sujets d'actualité. Lorsque les élèves sont activement engagés dans une activité d'apprentissage, par exemple dans le cadre d'une pédagogie coopérative, l'indiscipline est moins fréquente.


  • Absence de structure ritualisée Les élèves attendent un cadre clair et structuré,,. En début de cours, ils peuvent avoir du mal à adopter une posture de travail immédiate. L'absence de rituels réguliers pour marquer la transition entre le jeu (ou les préoccupations extérieures) et le travail ("re-créant le cadre scolaire") contribue au désordre,.


  • La parole individuelle Les élèves baignent dans un univers social très participatif, où la parole individuelle (texte, réseaux sociaux) est omniprésente. Ils doivent donc apprendre à maîtriser ou réguler cette expression verbale en classe.


Il est important de noter que le travail en groupe génère un "bruit pédagogique" qui peut être interprété comme du désordre ou du bavardage, mais qui est en réalité le signe d'une négociation positive et d'une activité réelle propice à l'apprentissage,.


Facteurs liés à la professionnalisation de l'enseignant

L'efficacité de la gestion de classe est directement liée à la préparation et aux compétences des enseignants.


  • Formation insuffisante en gestion de classe Les enseignants français, notamment les débutants, se sentent moins bien préparés à la gestion du comportement des élèves et de la classe que leurs homologues de l'OCDE,, ce qui est une source de difficulté professionnelle.


  • Le "piège" de l'écriture pour le calme Certains enseignants recourent à l'écriture ou à la copie pour obtenir le calme, car la conduite de classe est une compétence qui requiert de véritables techniques.


L'omniprésence du bavardage ou du bruit au collège est un signal de la difficulté qu'a le système à adapter ses structures et ses pratiques (souvent héritées d'un modèle de transmission frontal) à un public d'élèves plus hétérogène et habitué à une participation active dans la société numérique,. Ces perturbations consomment une part significative du temps d'enseignement, nuisant à l'apprentissage de tous les élèves,.


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Néanmoins, qu'en faisons-nous ?

Quelques curseurs (voir infographie) relèvent du ressort de l'enseignant dans sa classe; les autres, pas forcément ou pas tout seul en tout cas; pour ce qui concerne les pratiques en classe, on peut tenter plusieurs choses et d'abord peut-être partager l'analyse avec les élèves (en heure de vie de classe ?): puis aussi, après:


  • Proposer les activités à la portée des élèves et ayant un intérêt pour celui-ci.

  • Apprêter d’autres activités pour ceux qui apprennent vite (pédagogie différenciée)

  • Proposer des activités intermédiaires aux élèves en difficultés pour les aider à retrouver le niveau de la classe (pédagogie différenciée).

  • Circuler en classe et apporter les explications personnalisées aux élèves en difficultés et les encourager au moindre progrès.

  • Éviter les temps morts pendant la leçon.

  • S’assurer que tous les élèves possèdent les outils de travail. Au besoin, les en fournir.

  • Faire travailler les élèves en équipe (travail coopératifs). Les élèves doués pourront ainsi aider ceux qui ont des difficultés.


 ad libitum


Sources

Florence Ehnuel (2012) - "Bavardage : Parlons-en enfin ! Pour une classe à l'écoute", https://dante.univ-tlse2.fr/access/files/original/29a066fb97ff836be1f2fc8e6d2d239be215ad51.pdf

Mémoire DUMAS (2019) - "Autorité et gestion de classe : comment pallier les bavardages défavorables aux apprentissages du groupe classe ?" Disponible sur : https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-02184450v1/document

François Muller (2023) le manuel de (sur)vie) l'usage de l'enseignant, 7ème éd,, éd. de l'Opportun


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