Le développement professionnel des enseignants est aujourd'hui reconnu comme un pilier essentiel de la qualité de l'éducation. Comme l'a souligné John Hattie dans ses travaux sur l'efficacité des pratiques éducatives, l'impact de l'enseignant sur la réussite des élèves est considérable. Cependant, en France, nous faisons face à des défis importants dans la mise en œuvre de ce développement professionnel, particulièrement lorsque nous nous comparons à des pays comme la Nouvelle-Zélande, l'Écosse ou l'Ontario.
Les obstacles au développement professionnel en France
1. Une culture professionnelle à faire évoluer
En France, nous sommes héritiers d'une tradition qui considère l'enseignant comme un "expert" dès sa formation initiale. Cette conception, bien qu'elle valorise la profession, peut paradoxalement freiner le développement professionnel continu. Elle engendre souvent une réticence à l'observation et à l'évaluation par les pairs, pourtant essentielles à l'amélioration des pratiques.
François Muller souligne l'importance de faire évoluer cette culture vers une approche plus collaborative et réflexive.
2. Un système éducatif centralisé
La structure centralisée de notre système éducatif, si elle garantit une certaine équité sur le territoire, peut aussi limiter l'autonomie des établissements et des enseignants dans leur développement professionnel. Le manque de flexibilité dans l'organisation du temps scolaire rend difficile l'intégration de moments dédiés à la formation et à la collaboration entre pairs.
3. Une formation continue perfectible
Bien que des efforts aient été réalisés, notre offre de formation continue reste souvent déconnectée des besoins réels du terrain. Le manque de suivi et d'accompagnement post-formation limite l'impact réel sur les pratiques en classe. Helen Timperley, chercheuse néo-zélandaise, insiste sur l'importance d'un développement professionnel ancré dans le contexte spécifique de chaque enseignant et soutenu dans la durée.
Regards sur les pratiques internationales
1. La Nouvelle-Zélande : un modèle d'accompagnement
La Nouvelle-Zélande a mis en place un système remarquable d'accompagnement des enseignants débutants. Ce système, qui s'étend sur plusieurs années, permet une transition progressive vers une pleine responsabilité professionnelle. De plus, la culture de collaboration et de partage de pratiques est profondément ancrée dans le quotidien des enseignants néo-zélandais.
2. L'Écosse : une approche nationale et systémique
L'Écosse a développé un programme national de développement professionnel qui couvre l'ensemble de la carrière des enseignants. Ce qui est particulièrement intéressant, c'est la reconnaissance formelle des efforts de formation dans l'évolution de carrière, créant ainsi une incitation forte au développement continu.
3. L'Ontario : l'intégration au quotidien
La province canadienne de l'Ontario a fait le choix de mettre en place des communautés d'apprentissage professionnel. Cette approche intègre le développement professionnel au quotidien des enseignants, favorisant un apprentissage continu et collaboratif. John Hattie a d'ailleurs souligné l'efficacité de ces communautés d'apprentissage dans ses méta-analyses.
Les pistes d'amélioration pour la France
À la lumière de ces exemples et des travaux de chercheurs comme François Muller, Helen Timperley et John Hattie, plusieurs pistes d'amélioration se dessinent pour la France :
1. Repenser notre culture professionnelle : encourager la collaboration, l'observation mutuelle et le feedback entre pairs.
2. Décentraliser certaines décisions : donner plus d'autonomie aux établissements pour organiser le développement professionnel en fonction des besoins locaux.
3. Valoriser le développement professionnel continu : intégrer les efforts de formation dans l'évolution de carrière des enseignants.
4. Ancrer la formation dans la pratique : développer des programmes de formation continue en lien direct avec les réalités du terrain et les besoins des enseignants.
5. Créer des communautés d'apprentissage : s'inspirer du modèle ontarien pour favoriser un développement professionnel intégré au quotidien.
d'après les actions couvertes par l'association depuis 20 ans
Conclusion
Le chemin vers un développement professionnel efficace des enseignants en France est encore long, mais il est essentiel pour l'avenir de notre éducation. Les exemples internationaux nous montrent qu'il est possible de créer un environnement où l'apprentissage continu des enseignants est valorisé et intégré à la culture professionnelle.
Comme le souligne Helen Timperley, le développement professionnel efficace n'est pas une série d'événements ponctuels, mais un processus continu d'enquête et d'amélioration. En nous inspirant des meilleures pratiques internationales et en les adaptant à notre contexte, nous pouvons construire un système où le développement professionnel des enseignants devient un moteur puissant de l'amélioration de la qualité de l'éducation en France.
Le défi est de taille, mais l'enjeu est crucial. Car ce sont les enseignants qui font la différence. Investir dans leur développement professionnel, c'est investir directement dans la réussite de nos élèves et l'avenir de notre société.
Des enseignants qui apprennent, ce sont des élèves qui réussissent (François Muller)
Pour aller plus loin
Voir la série de posts dédiés à la question du développement professionnel des enseignants
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