A l’occasion d'un nouveau projet académique dans plusieurs académies, et fort des analyses issues de l’expérimentation comme des écrits nombreux des équipes (en innovation, cf; les Cardie), les équipes sont en très grande majorité confrontées au traitement pédagogique de l’hétérogénéité, tous niveaux confondus le débat au collège revient sur la question des "groupes de niveaux" que les plus vieux ont connus ans les années 70; il semble plus que jamais nécessaire et urgent d’engager résolument les personnels, direction et enseignants, dans la différenciation pédagogique; à quelles conditions alors ?
Trois chantiers
La différenciation pédagogique, ce peut être un effort collectif et durable sur au moins trois axes, faisant les uns les autres système :
· S’engager dans une approche compétence dans la formation des élèves et dans l’évaluation de leurs travaux. A l’instar de la mise en œuvre du CECRL dans les langues vivantes par exemple, comme du CCF en lycée professionnel, en s’appuyant sur des pratiques déjà installées à l’occasion de PIX, comment passer d’une logique d’enseignement noté à une logique d’apprentissages validés ?
· Développer l’individualisation des parcours de formation des élèves : comment passer d’une logique de classe fixe à des groupements différenciés et des parcours diversifiés sur un cycle d’étude par exemple ?
· Varier l’organisation des temps d’apprentissages et des rythmes scolaires : comment dépasser le carcan des 55 minutes de cours, trop long pour faire la même chose, trop court pour s’engager dans des vrais apprentissages et un développement des compétences ?
La lutte contre l'échec scolaire ne consiste pas à inventer une individualisation des parcours qui existe à l'état "sauvage", mais à la maîtriser. La maîtrise de leur individualisation passe par la mise en place de dispositifs de suivi et de régulation sur plusieurs années consécutives: à différencier de l'individualisation de l'enseignement dirigée vers l'individu (ex. tutorat).
s'approprier le concept d'individualisation et opérer la rupture conceptuelle avec l'idée d'individualisation de l'enseignement
concevoir et maîtriser des progressions dans les apprentissages sur plusieurs années au minimum à l'échelle d'un cycle
inventer et mettre en oeuvre des modes de groupement des élèves qui leur donne un sentiment de stabilité et d'appartenance sans revenir au groupe-classe traditionnel: groupes multi-âges, groupes de réflexion, de besoins, de niveaux
concevoir des processus et des outils d'aiguillage permettant de suivre et de réorienter les cheminements individualisés et de décider de l'affectation des élèves à telles activités ou tels groupes
Sur ces trois points, des équipes, du 1er comme du 2ème degré, ont déjà développé des dispositifs ajustés et régulés au long cours. Mais cela reste presque anecdotique ; manifestement, quelque chose dans l’organisation résiste.
Ces trois chantiers présentent des caractéristiques semblables qui expliquent en grande partie la difficulté pour les équipes de « passer à l’acte » : aucun d’entre eux n’est indépendant des deux autres ; aucun d’entre eux ne relève que d’un seul métier (direction, enseignants), aucun d’entre eux ne se décrète sans temps ni négociation locale. (voir annexe)
Ces chantiers combinent étroitement trois champs d’activité : didactique des disciplines, pédagogie variée et organisation collective du travail, sur une durée suffisante. Poser la question de la différenciation revient à porter son analyse sur le fonctionnement système de l’école ou de l’établissement, sur son pilotage, sur ses choix stratégiques et structurels, mais aussi sur des dimensions plus cachées comme des pratiques de classes
Pour cette raison, la logique locale s’impose, l’accompagnement du changement, aujourd’hui peu présent, s’avère nécessaire.
Conditions du changement
Les leçons tirées des expérimentations passées et présentes nous renseignent sur l’efficacité des établissements en focalisant notre attention sur quelques critères favorables à l’installation de dispositifs de différenciation et d’individualisation :
Dans un texte synthétique, Philippe Perrenoud livrait sa version des conditions de la différenciation à l’école en quinze points. Je vous soumets ces quinze items, en sollicitant votre analyse sur trois points : chaque item relève plutôt du domaine des valeurs (« vouloir »), ou encore du domaine des moyens et de l’organisation interne (« pouvoir »), ou enfin du domaine des compétences, de la formation (« savoir ») ? Plusieurs réponses possibles.
Pour différencier les approches en établissement, il conviendrait de combiner au moins plusieurs facteurs, tels que :
Voir l'article entier ici http://francois.muller.free.fr/encyclopedie/classeentiere.htm
Nous pourrions reprendre quelques points remarquables pour leurs résultats issus du programme d’éducation de certains Etats d’Amérique :
· Refaire le pari de l’éducabilité pour tous, « tout le monde est d’accord avec le fait que jusqu’à ce chaque étudiant ait réussi son examen final on ne se repose pas ».
· Faire passer des tests d’évaluation rares mais réguliers.
· Différencier les approches. « la différenciation, pas la remédiation ».
· Revoir l’organisation (groupes, temps, horaires, espaces…)
· Miser sur la communication entre enseignants. « On va dans la classe d’un collègue tous les jours »
Ces dimensions, souvent « cachées », de nos pratiques, de nos organisations semblent déterminantes à prendre en compte. Cette complexité qui rend compte des réalités variées de nos écoles, de nos établissements, nous avons à l’appréhender ensemble, avec les enseignants, avec les personnels de direction, avec les corps d’inspection, avec les formateurs de toute nature. C’est bien une problématique d’ordre professionnelle, un changement ambitieux, et une confiance à garantir aux équipes, pour réussir le pari de la réussite de tous les élèves.
Le socle commun nous oblige, le savons-nous ? Les élèves au lycée, notamment ceux qui « rament », mais aussi ceux qui redoublent, leurs familles, sont en droit de nous interroger sur la dimension du « care » (dit-on en anglais), c’est à dire sur les capacités d’un établissement à accompagner au mieux ses élèves.
Philippe Perrenoud a tenté une esquisse où tout est question de curseur : passer d’une logique d’enseignement à une logique de formation à la compétence, induit plusieurs changements :
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